Page:Lourié - La Philosophie de Tolstoï.djvu/21

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Sa tante qui était, d’après l’expression de Tolstoï, « l’être le plus pur du monde », ne désirait rien pour lui qu*une liaison avec une femme mariée. « Rien ne forme un jeune homme comme une liaison avec une femme comme il faut, » disait-elle. Elle souhaitait encore pour lui un autre bonheur, celui d’être aide de camp de l’Empereur.

Dans la société des amis de son frère Nikolaï que Léon Nikolaïevich aimait beaucoup, il jouait un rôle insignifiant qui le faisait souffrir : cependant « il aimait à se tenir dans sa chambre lorsqu’il avait du monde, et à observer sans mot dire[1] ».

Sa vie intérieure ne fut connue que de Tolstoï lui-même ; elle fut cachée soigneusement, par timidité, aux regards curieux. Sa vie extérieure, durant sa vie d’étudiant, se passait en orgies, duels et cartes. Il aimait aussi à analyser le comme il faut. Il partageait tout le monde en gens comme il faut et comme il ne faut pas. Ces derniers se subdivisaient eux-mêmes en gens pas comme il faut et en bas peuple. Il avait de la considération pour les gens comme il faut et les jugeait dignes d’être avec lui sur un pied d’égalité. Il méprisait et haïssait ceux de la seconde catégorie : il se sentait personnellement offensé par eux. Ceux de la troisième catégorie n’existaient pas pour lui. Son comme il faut consistait avant tout à bien parler français, avec un bon accent. La seconde condition du comme il faut était d’avoir les ongles longs, propres et soignés ; la troisième, de savoir saluer, danser et causer ; la quatrième, très importante, d’être indiffé-

  1. Adolescence.