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IV


De retour de chez les Baschkirs, Tolstoï fréquenta beaucoup la famille du docteur Berce, à Moscou, où il y avait trois jeunes filles. Tolstoï s’éprit de la seconde, Sophie Andréevna, mais les trois sœurs étaient éprises de lui. Un jour il vint et déclara aux jeunes filles qu’il était très malheureux : il venait de perdre aux cartes, et, pour payer ses dettes, il était obligé de vendre à Katkov les Cosaques, pour mille roubles. Les jeunes filles se mirent à pleurer. Quand il demanda la main de Mademoiselle Sophie, celle-ci lui répondit : « Cela ne peut être… Pardonnez-moi. » Et pourtant « elle respirait avec peine et le bonheur remplissait son cœur ». La raison de son refus était bien simple : le Dr Berce ne voulait pas marier sa seconde fille avant l’aînée. Tolstoï déclara qu’il allait se suicider, mais continua néanmoins à fréquenter la famille Berce. Sa deuxième déclaration fut agréée.

Le mariage eut lieu le 23 septembre 1862. Tolstoï avait trente-quatre ans, et sa fiancée en avait dix-huit. Les jeunes mariés partirent pour Iasnaïa-Poliana. Malgré son jeune âge, la comtesse sut seconder son mari dans l’administration de ses terres. Tolstoï trouva en Sophie Andréevna une vraie compagne aimante, sincère, consciente ; c’est elle qui réunissait, qui classait ses notes littéraires, qui copiait ses manuscrits : elle recopia sept fois la Guerre et Paix ; elle seule déchiffrait son écriture. C’est elle qui, — plus tard, — éditait les œuvres de son mari.