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foi qu’il cherchait ; que leur foi n’était pas une foi, mais rien qu’une des consolations épicuriennes de la vie. La foi pour Tolstoï ne s’exprimait pas en symboles extérieurs et en paroles. Était-il possible que la doctrine de Jésus admît nécessairement une pareille contradiction ? Il ne pouvait le croire. Il renonça alors à la vie du monde ayant reconnu que ce n’était pas la vie, « mais seulement une parodie de la vie ».

Il se mit à lire et relire la Bible et l’Évangile.

II

Tolstoï connut à cette époque le paysan Soutaïev, le fondateur d’une secte religieuse qui cherche la vérité d’après les évangiles. Soutaïev était le paysan le plus pieux de son village. C’est à cinquante ans qu’il abandonna l’église orthodoxe. « Je ne forme pas de secte, disait Soutaïev au pope, je ne veux que devenir un vrai chrétien et y amener les autres. »

— Et en quoi consiste le vrai christianisme, lui demandait-on ?

— Non pas dans les rites, mais dans l’amour et dans la vérité, répondait-il.

— Qu’est-ce que la vérité ?

— La vérité, c’est l’amour dans la vie commune[1].

Tolstoï connut Soutaïev, il causa souvent avec lui sur les révélations des Évangiles. C’est lui qui lui inspira ridée de se rapprocher des croyants du peuple,

  1. Prougavine, Raskol, Moscou, 1887.