Page:Luchaire - Inauguration de l’Institut Français de Florence.djvu/10

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Paris même : à Paris, aussi bien à la Direction de l'Enseignement supérieur, à la Direction des Beaux-Arts, dans les Académies et dans les milieux artistiques, que parmi les professeurs de l'Université — et de ceux-ci, en particulier, l'approbation nous a été sensible. Ce fut d'abord une curiosité bienveillante, qui se transforma vite en appui moral, puis en aide matérielle. Et ceux qui nous ont ainsi encouragés sont vraiment trop nombreux pour que je puisse les nommer en ce moment. Mais, Messieurs— je le constate en passant — ces encouragements d'hommes très distingués et si divers ne montrent-ils pas bien que l'œuvre est bonne, que son heure est venue, que pour être né à Grenoble le projet de notre collègue correspond bien à une préoccupation de la France et que sa réalisation est désirée par l'Italie ?

« C'est que M. Luchaire, assis dans la première chaire de langue italienne de province, n'a pas voulu borner son rôle à propager un idiome dans des milieux d'enseignement ou d'érudition ; il a désiré bien autre chose : faire des études italiennes les études franco-italiennes, les rendre plus vivaces et plus fécondes en les internationalisant. Encore faut-il voir dans cet énoncé, d'allure trop simple, tout ce qu'il contient, tout ce qu'on a voulu y mettre ! Je développe donc enfin les idées de M. Luchaire, j'espère ne pas les trahir.

« Longtemps, dans notre pays, on a trop sacrifié à l'étude de la langue et de la littérature des deux grands peuples du Nord, nos voisins — comme s'il n'existait pas de grands peuples ailleurs, ou si les autres nations pouvaient être considérées comme valeurs sociales négligeables. Cette erreur s'explique, si Ton se reporte au courant d'opinion qui prévalait chez nous il y a quelque trente-cinq ans ; mais il est grand temps qu'elle achève de disparaître et que la langue italienne prenne sa due place, c'est-à-dire une grande place, dans notre enseignement, à côté de ses aînées. Une autre grave erreur, qui compte encore des partisans, veut ne chercher dans les langues modernes qu'un instrument de culture intellectuelle générale, tandis qu'il y faut voir surtout un moyen d'arriver à la complète intelligence des conditions politiques, économiques et sociales des nations. Il faut bien se persuader aujourd'hui que l'étude des langues, à un point de vue personnel d'esthétique et d'érudition pures, a fait son temps et qu'elle doit être réservée à des spécialistes ou aux dilettantes. Il est