Page:Luchet, etc. - Fontainebleau, 1855.djvu/32

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qui la concerne. A quoi bon parler, d’ailleurs ? Ce que les discordes civiles ont causé de désastres dans notre malheureux pays démontre au delà cet axiome démoralisateur : — Nul n’est honnête s’il n’est de mon avis : servir un autre Dieu que moi, c’est m’insulter. — Les petites cités oisives poussent ceci jusqu’à l’héroïsme, jusqu’au chef-d’œuvre ; je ne le dis pas pour Fontainebleau toute seule. Elles n’acceptent point le bienfait, le bien-être, le mouvement, le profit même, elles refuseraient la vie, apportés par celui qu’elles n’aiment pas. Or ce sont des lieux où l’on n’aime vraiment personne, mais où l’on hait à peu près tout le monde, plus ou moins. En certains jours ou y fait à certains hommes des injustices et des misères que nul ne saurait dire, parce que personne ne le croirait. C’est comme un concours instinctif, spontané, tacite, d’insinuations venimeuses, de perquisitions moqueuses, d’interprétations hideuses, de guet-apens à la réputation, de pièges au repos, jusqu’à y mêler les femmes, jusqu’à faire pleurer les enfants ! Et ceux qui agissent ainsi n’ont pas besoin de se concerter pour agir ; ils s’entendent atmosphériquement, ainsi que les corbeaux, souterrainement, ainsi que les mulots ; ils apparaissent tout à coup et partout après votre chute, comme les crapauds après la pluie. Oh ! la province, cher Denecourt,