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El Arab

der, l’obstacle franchi, comment pareille escalade avait pu se faire.

L’adresse de ces chevaux, quelle chose surprenante ! C’est la marque même de l’Orient. Les chevaux y font voir, quand on leur laisse leur initiative, jusqu’à quelle intelligence peut aller l’instinct animal. Adroits comme des chamois, ces huit-là venaient à bout des pires passages.

L’espoir des forêts nous soutenait dans une ascension si pénible. Cependant, après huit heures de lutte, et la mince neige du sommet sur le point d’apparaître, aucune nouvelle de ces forêts. Où donc étaient-elles ?

Ah ! Ah ? Voici des signes précurseurs ! Ces vestiges calcinés de troncs et de branches, ces noirs moignons de tous les côtés, ce sont les traces de quelque incendie partiel comme en connaissent toujours les régions sylvestres.

— Nous y arrivons !… triompha J. C. Mardrus.

Y arriver ? Nous y étions ! Car, les forêts à perte vue, c’était cela : des arbres brûlés. Du charbon.


L’escalier chaotique venait de s’achever. Nous avions atteint le sommet. Les chevaux soufflaient, écumants de transpiration.

D’une cahute grossièrement bâtie sortirent trois êtres hirsutes qui vinrent à notre rencontre. L’un de ces hommes savait quelques mots de français. Ce fut de celui-là que J. C. Mardrus l’apprit. La forêt tout entière avait été jadis incendiée. Personne ne pouvait dire quand ni comment. Dans leur cahute, les trois compagnons avec le lait d’un grand troupeau de brebis égaillé dans la montagne, fabriquaient des fromages pour le compte du sultan.

Toutes informations données par bribes, les mots ne venant pas facilement.


Une déception d’enfant (la plus grave de toutes), se traduisit chez mon mari par de la pâleur et du silence.