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LE MAL DES ARDENTS

nades, riait, chantait, carambolait. Olivier le regardait sans bien comprendre cette agitation incohérente mais heureuse.

— Tu t’étonnes ? dit Rabevel. Vois-tu, c’est cela la vie. Des secousses successives et en sens contraires. Moi je ne suis plus d’aplomb. L’humanité normale se représente par un pendule dans la position verticale. Je n’y puis rester. C’est la stagnation cela, ce n’est pas la vie. Mettons le pendule en mouvement, et non par des oscillations timides, mais à toute volée. Il dépassera l’équilibre ! Comprends-tu ? Il dépassera l’équilibre : Voilà qui est beau et nouveau. Les esprits modérés, nous dirons les esprits bornés, ne voient que l’équilibre. Sottise. Nous dépassons cet état. De la dépression à la compression, du rire aux larmes, nous jouirons de nos facultés et nous connaîtrons tout le cercle sur quoi peut évoluer ce pendule qu’une main timide laissait reposer !

— Vous casserez la corde de votre pendule !

— Et qu’importe ! alors nous irons aux étoiles.

— Ou dans la boue, mon cher. Pulvis es

— Eh bien ! je préfère que la corde casse sous l’effort, sous l’attraction de la force centrifuge qui sollicite les êtres en mouvement à l’appel de lois inconnues des créatures, astres ou dieux d’où émanent ces forces universelles auxquelles se soumettent hardiment les corps mouvants ! Je serai happé plus loin. Qu’est la chute sans grâce du poids immobile quand la corde casse rongée de vétusté ? Et pouvez-vous la comparer à ma trajectoire ?