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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/29

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LE FINANCIER RABEVEL

si je m’aliène le Bon Dieu par de pareilles offenses ! » Il pleurait presque, repris d’un mysticisme dont il ne percevait pas la déviation. Il arriva à l’hôtel, monta à la chambre, frappa, dit son nom. Un filet de lumière filtrait sous la porte, il distingua des gémissements et se sentit perdu de perversité et de vices, se jugea coupable et responsable devant Dieu d’avoir ainsi tourmenté cette pauvre Angèle ; il désirait entrer, la consoler, la prendre dans ses bras tendrement, lui montrer, montrer à Dieu qui le voyait que son fonds n’était pas mauvais, il avait cédé à un instant de folie, à une tentation du Malin, mais s’en repentait. Une espèce de griserie le possédait. Il redit son nom d’une voix plaintive. Mais la voix d’Angèle, basse, tremblante, pleine de violence, répondit :

— Allez-vous-en, allez-vous-en !

Il resta inerte ; puis tout s’éclaira : « Elle a raison, elle n’est pas ma femme, elle ne veut plus du péché ; elle a raison. »

Il redescendit et demanda une autre chambre « pour ne pas éveiller Madame ». — « On va vous donner la chambre voisine qui communique avec elle et qui est libre ». Il y monta, alla droit à la porte de communication, vérifia qu’elle était verrouillée du côté d’Angèle, la verrouilla de son côté, écouta un instant à la cloison, n’entendit rien, et, enfin, se coucha, harassé, et se rendormit.

Vers les sept heures, il s’éveilla en sursaut. La femme de chambre frappait à la porte voisine. La voix d’Angèle répondit :