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Églogue X.

Une expédition militaire dont il est parlé dans cette églogue en fixe la date.

L’an 717, le consul Marcus Agrippa passa les Alpes avec une armée, et s’avança par les Gaules sur le Rhin. Il était le premier depuis Jules-César qui eût pénétré dans la Germanie. (Dion Cassius, liv. 48, chap. 49.)

À la même époque, Sextus Pompée, alors maître de la Sicile et de la mer, occupait par sa flotte le golfe Adriatique, menaçant à la fois les côtes de l’Italie et de la Grèce. Les vers 44 et 45 de cette églogue rendent probable que Gallus commandait alors pour Octave un corps de troupes dans le Péloponnèse, et sans doute aux environs de l’Arcadie, puisque Virgile le place au milieu des bergers arcadiens, ce qu’il n’eût point fait sans motifs.

Abandonné par Lycoris qui avait suivi un autre amant dans l’expédition sur le Rhin, Gallus engagea le poëte à chanter ses amoureuses douleurs :

Neget quis carmina Gallo ?

C’est à ce vœu de Gallus entendu par son ami que nous devons cette délicieuse églogue.

v. 1. Extremum hunc, Arethusa, mihi, concede laborem. Virgile, en terminant ses églogues, a soin, pour en compléter le classement, d’annoncer celle-ci comme étant la dernière. C’est une preuve de plus de l’attention qu’il a eue de marquer l’ordre dans lequel il les a composées.

v. 50. lbo, et Chalcidico quæ sunt mihi condita versu Carmina, pastoris Siculi modulabor avena. Gallus avait probablement écrit à Virgile que, pour se distraire de l’infidélité de Lycoris, il s’amusait à traduire les pastorales d’Euphorion, poëte grec, né à Chalcis. Toutes les poésies de Gallus, y compris quatre livres d’élégies sur Lycoris, sont perdues pour nous. Quintillien fait à ses vers le seul reproche d’être un peu durs.



LES GÉORGIQUES.

LIVRE PREMIER.

Mécène avait engagé Virgile à composer les Géorgiques ; il sut faire servir à la gloire de son ami et de son maître les talents de tous les genres ; il fut aussi utile à Auguste par la finesse de sa politique, qu’Agrippa par son courage.

v. 14… Cui pinguia Ceæ. Aristée, fils d’Apollon et de Cyrène, révéré particulièrement des bergers, auxquels il enseigna l’art de recueillir le miel.

v. 19… Uncique puer moderator aratri ; Et teneram ab radice ferens, Silvane, cupressum. Il s’agit dans le premier vers de Triptolème, selon les uns ; d’Osiris, suivant les autres ; dans le second, de Sylvain, par qui le jeune Cyparisse fut changé en cyprès.

v. 22. Quique novas alitis non ullo semine fruges. Quelques éditions portent non nullo : celle leçon me paraît fausse. Il est question ici des plantes qui viennent d’elles-mêmes, et Virgile les distingue des plantes semées, satis, dont il parle dans le vers suivant.

v. 29. An deus immensi venias maris. Les géographes ne s’accordent pas sur la situation de Thulé ; tous les auteurs et tous les poëtes qui en ont fait mention, en parlent comme de la partie la plus reculée vers le monde connu.

v. 32. Anne novum tardis... Par ces mots tardis mensibus on entend généralement les mois d’été, parce-qu’alors les jours sont plus longs. Peut-être ce passage, qui a tant exercé les commentateurs, peut s’expliquer encore plus naturellement, si l’on veut se rappeler que le Lion, la Vierge, le Scorpion, sont en effet plus lents dans leur ascension, que les neuf autres signes du zodiaque.

v. 33. Qua locus Erigonen… Érigone est le même signe que la Vierge.

v. 48. Bis quæ solem, bis frigora sensit. Ce passage est un de ceux qui ont été le plus controversés entre les critiques. Servius, le plus ancien, et peut-être le moins judicieux, entendait par frigora la fraîcheur de la nuit, et par solem la chaleur du jour. Ce vers s’explique naturellement par ce passage de Pline : « Quarto seri sulco Virgilius existimatur voluisse, cum dixit optimam esse segetem bis que solem, bis frigora sensisset. »

v. 56… Nonne vides croceos ut Tmolus odores. Montagne de la grande Phrygie, fertile en vin et en safran.

v. 58… Virosaque Pontus Castorea. Le castoreum est d’un grand usage en médecine ; c’est un soporifique très-efficace.

Lucrèce a dit :

Castoreoque gravi mulier sopita recumbit.

v. 68… Sub ipsum Arcturum tenui… L’Arcture ou le Bouvier, du temps de Columelle et de Pline, se levait pour les Athéniens avec le soleil, quand il était dans le douzième degré un tiers de la Vierge ; et pour les Romains trois jours plus tôt, quand le soleil était dans le neuvième degré un quart de la Vierge ; l’équinoxe d’automne commençant alors le 24 ou le 25 septembre.

v. 71. Alternis idem tonsas cessare novales. Pline entend par le mot novales une terre qu’on ensemence de deux ans l’un.

v. 79. Sed tamen alternis… Virgile, en parlant plus haut du repos des terres, se sert du mot alternis, et c’est sans doute pour cela que les commentateurs l’expliquent ici dans le même sens : mais il faut observer que plus haut il est joint aux mots novales et cessare ; ce qui en détermine le sens dans cet endroit. Je pense qu’ici il ne peut être entendu de même, et que Virgile veut parler seulement du changement de semence.

v. 94. Multum adeo, rastris… Les Romains brisaient d’abord la terre avec des râteaux, et l’aplanissaient ensuite en y traînant des claies ; c’est ce que Columelle exprime par ces mots, qui répondent exactement aux vers de Virgile : glebas sarculis resolvere, et inducta crate coequare.

v. 102. Nullo tantum se Mysia cultu. La Mysie est une partie de l’Asie Mineure ; il y a dans cette province une montagne et une ville appelée Gargare. Comme les peuples de ce pays devaient moins leurs belles moissons à leur industrie qu’à la bonté du sol, Virgile a dit très-bien :

Ipsa suas mirantur Gargara messis.

v. 148. Atque arbuta sacræ. Arbuta signifie ici l’arboisier ; son fruit ressemble beaucoup à la fraise, mais il est plus gros, et n’a point comme elle ses graines en dehors.

v. 151. Esset robigo. La rouille est une maladie à laquelle le blé est très-sujet. Selon Pline, la rouille et le charbon sont la même chose, et nuisent non-seulement aux blés, mais aux vignes, qu’ils brûlent comme le feu. Varron invoque le dieu Robigus, qu’il prie de préserver la vigne de ce que les Latins appelaient robigo.

v. 193. Semina vidi equidem. Quoique le mot semina s’entende généralement de toutes sortes de semences, Virgile parle ici des légumes seulement : cette interprétation est appuyée sur ce passage de Columelle, « Priscis rusticis, nec minus Virgilio, prius amurca, vel nitro macerari fabam, et ita seri placuit. »

v. 212. Cereale papaver. Pourquoi cereale appliqué