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La première roule déjà sur sa santé, mais l’écriture est normale : c’est l’écriture ordinaire du romancier ; on sent que si le physique est atteint, l’équilibre intellectuel est conservé. Dans la seconde, l’écriture est pâteuse et traduit de la fatigue. Les premières lignes tracées indiquent l’effort mental que l’auteur accomplit pour se mettre en train ; une fois l’élan donné, il marche. Mme de Maupassant - la mère ! - sent déjà dans cette lettre quelque chose de troublé.

Voici les lettres. Les initiales G. M. et l’adresse, 24, Rue Boccador, appartiennent au papier à lettres :

24, Rue Boccador.

G. M.

Ma bien chère Mère,

L’appartement que tu me proposes me paraît me convenir. Tu peux donc l’arrêter pour avril. Veux-tu que je t’envoie de l’argent.

Ne t’inquiète pas trop de ma santé. Je crois tout simplement que mes yeux et ma tête sont très fatigués, et que cet hiver abominable a fait de moi une plante gelée. J’ai bonne mine. Je n’ai plus du tout mal au ventre. J’ai besoin d’air et de calme avant tout.

J’ai consulté sur mon état nerveux un homme qu’on dit très supérieur à Charcot. Jeune et déjà professeur et médecin des hôpitaux : tous ses confrères le célèbrent.

Il m’a examiné pendant très longtemps, a écouté toute mon histoire, puis m’a dit :

« Vous avez eu tous les accidents de ce qu’on appelle la neurasthénie (style Charcot, on disait au-