Page:Lumbroso - Souvenirs sur Maupassant, 1905.djvu/80

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que j’aurais plaisir à vous parler de Guy de Maupassant ; mais il me donne le regret de n’avoir pas autant de choses à vous dire que je l’aurais voulu. En effet je n’ai connu que très peu et très tard le


Vous buvez le bonheur dans la coupe profonde

    dans les gorges, dans les rochers qui tombent à pic, de grandes effusions d’ombre qui ont la solennité d’un immense apaisement.

    « Sous ces grands chênes aux branches retombantes, combien de fois ai-je vu passer Mlle Aline Dudlay, promenant par les allées les douces cantilènes de Bérénice, les tendres reproches de Pauline, les fureurs d’Agrippine !

    « Et mon aimable interlocuteur puisait dans les poches de son interminable redingote :

    « — Puisque vous aimez les vers, je vais à mon tour vous en dire, et qui ne sont pas du premier venu. C’est Taine lui-même qui me les a donnés, un soir à cette place, où j’avais l’honneur de l’entretenir, et je vous prie de croire que l’illustre philosophe ne prodiguait pas à tout le monde ses petits papiers.

    « Assurant son lorgnon, tenant avec respect le papier qu’il venait de puiser dans son portefeuille, il commença :

    Poésie par M. Hippolyte Taine, adressée à ses chats :
    Puss, Ébène et Mitonne.
    Le Bonheur.

    Dans votre cœur tranquille et dans vos larges yeux.
    Ô vénérable chat, la sagesse est innée ;
    Votre rouet sans fin près de la cheminée
    Est l’écho bourdonnant d’un rêve harmonieux.
    Quand vous voulez dormir comme dorment les Dieux,
    Vous vous roulez en boule, âme prédestinée ;
    Vous laissez les soucis à la race damnée
    Qui laboure la terre et qui sonde les cieux.
    Tel qu’un brame affranchi des misères du monde