Page:Luxembourg - Réforme ou révolution ? Les lunettes anglaises. Le but final.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aussi de toute critique exercée à l’endroit de cette activité. Nous n’avons pas à nous boucher les oreilles lorsque ces principes mêmes sont critiqués par quelqu’un qui se trouve en dehors de notre Parti. Mais aussi longtemps que nous les considérons comme le fondement de notre existence en tant que parti, nous devons y demeurer attachés et ne pas les laisser ébranler par nos membres. À ce sujet, nous ne pouvons accorder qu’une liberté : celle d’appartenir ou de ne pas appartenir à notre Parti.

Nous ne contraignons personne à marcher dans nos rangs, mais si quelqu’un le fait volontairement, force nous est de supposer qu’il a accepté nos principes.

Autrement, si nous remettions chaque jour en question les fondements de notre programme et de notre tactique, on ne verrait pas pourquoi les anarchistes, les « nationaux-sociaux » (du pasteur Naumann), les partisans de la « réforme morale » ne seraient pas admis dans le Parti au nom de la « libre critique », puisqu’il n’y aurait alors plus rien de solide, d’intangible, de délimité dans notre constitution. Il est vrai que nous cesserions alors d’être un parti politique distinct des autres partis par des principes déterminés.

Ainsi la liberté de la critique trouve ses limites pratiques dans notre essence même en tant que parti politique. Ce qui constitue le plus propre de nous-mêmes : la lutte de classe, ne saurait être l’objet d’une « libre critique » dans le Parti. Nous ne pouvons nous suicider au nom de la « liberté de la critique ». Mais l’opportunisme, comme a dit justement Bebel, tend à briser notre épine dorsale ; donc à nous détruire en tant que parti de la lutte de classe.

Enfin, la suprême manœuvre des partisans de Bernstein consiste à présenter les problèmes soumis à la discussion comme si « scientifiques », compliqués et difficiles, que si le commun des camarades s’avisait de les juger, voire de les trancher, il ferait preuve d’une présomption inouïe. Mais les desseins qui se cachent sous cette spécieuse évocation de la « pauvreté d’esprit » sont tellement transparents qu’il n’est pas nécessaire d’être « savant » pour en découvrir la trame.

Un congrès socialiste n’a pas à délibérer sur des problèmes de science et de théorie pures, mais sur une série de questions purement pratiques concernant les principes et la tactique du Parti.

Le congrès à venir devra aborder la question du militarisme et de la milice[1]. Il faudrait vraiment une forte dose d’impudence

  1. Il s’agissait du congrès annuel du Parti social-démocrate allemand qui allait se tenir à Hanovre, en octobre 1899, et à l’ordre du jour duquel figurait (point 6) la question du militaire et de la substitution d’une milice populaire à l’armée permanente.