Page:Luzel - Cinquième rapport sur une mission en Basse-Bretagne, 1873.djvu/31

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— Voyez donc où ! Qui aurait songé à le trouver là ? Mais n’importe, cette nuit je viendrai à bout de toi[1].

— C’est ce que nous verrons bien !

Et il se mit à chanter. Cette nuit-là il gela si fort, si fort, que le lendemain matin on trouva le mari et la femme collés l’un contre l’autre et morts de froid ! Mais le Roitelet s’était retiré dans un trou de muraille, près du four d’un boulanger, et là il ne sentit pas le froid. Mais il y rencontra une souris qui cherchait aussi la chaleur, et il s’éleva une dispute entre eux, au sujet de la place, si bien que, pour vider le différend, ils convinrent que, dans huit jours, il y aurait une grande bataille sur la montagne de Bré, entre tous les animaux à plumes et tous les animaux à poil du pays. Avis en fut donné de tous les côtés, et, au jour convenu, tous les animaux à plumes et à poil du pays se trouvèrent au rendez-vous, et le combat commença, un terrible combat. Les animaux à plumes perdaient et allaient être écrasés, quand arriva l’Aigle qui rétablit les chances de leur côté. Partout où il passait il abattait et éventrait tout…

Le fils du roi assistait au combat, à la fenêtre de son palais, et, voyant que l’Aigle allait tout détruire, au moment où il passait au ras de la fenêtre, il lui porta un coup de sabre et lui cassa une aile, si bien qu’il tomba à terre. La victoire resta indécise. L’Aigle, blessé et ne pouvant plus voler, dit au fils du roi :

— À présent, il vous faudra me nourrir, pendant neuf mois, de chair de perdrix et de lièvres.

— Je le ferai, répondit le prince.

Au bout des neuf mois, quand l’Aigle fut guéri, il dit au fils du roi :

— À présent, je vais retourner chez ma mère et je désire que tu viennes avec moi, pour voir mon château.

— Volontiers, répondit le prince.

Et il monta sur le dos de l’Aigle, et ils partirent[2].

L’Aigle avait une sœur et le prince devint amoureux d’elle, dès qu’il la vit. Cela ne plaisait pas beaucoup à l’Aigle, ni à sa mère. L’Aigle proposa au prince une partie de boules dont l’enjeu devait être la tête de celui-ci, s’il perdait, et la main de sa sœur, s’il gagnait. Le prince accepta. Mais les boules étaient de cinq cents livres chacune et le pauvre prince ne pouvait seulement pas les remuer, de sorte que l’Aigle gagna facilement.

  1. Dans une autre version, l’Hiver répond : « Ah ! là, je ne puis pas mettre le nez.» Et le conte est fini. Et en effet, ce qui suit parait complètement étranger à ce débat, qui forme un petit récit à part, comme il en existe plusieurs sur le Roitelet.
  2. Les aigles, les lions, les serpents, les dragons qui se rencontrent fréquemment dans nos traditions populaires me semblent être autant d’arguments en faveur d’une origine asiatique.