Page:Luzel - Contes populaires, volume 1, 1887.djvu/334

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A présent, je pars, et tu ne me reverras plus jamais !

Et il partit aussitôt, sans même l’embrasser.

Elle se leva pour le retenir ; ne le pouvant pas, elle courut après lui.

— Ne me suis pas ! lui cria-t-il.

Mais elle ne l’écoutait pas, et courait toujours.

— Ne me suis pas, te dis-je !

Elle était sur ses talons, elle allait l’atteindre ; il se détourna alors et lui donna un coup de poing en pleine figure. Le sang jaillit jusque sur sa chemise, et y fit trois taches.

— Puissent ces taches, s’écria la jeune femme, ne pouvoir jamais être effacées, jusqu’à ce que j’arrive pour les enlever moi-même !

— Et toi, malheureuse, répondit son mari, tu ne me retrouveras que lorsque tu auras usé trois paires de chaussures de fer à me chercher !

Pendant que le sang, qui coulait en abondance du nez de la jeune mère, l’empêchait de poursuivre, l’homme-poulain continuait sa course, et elle l’eut bientôt perdu de vue.

Alors, elle se fit faire trois paires de chaussures de fer, et partit à sa recherche. Elle allait au hasard, ne sachant quelle direction prendre.

Après avoir marché pendant dix ans, sa troisième paire de chaussures était presque usée,