Page:Luzel - Contes populaires, volume 2, 1887.djvu/268

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un petit coin de terre qu’elle possédait contre son habitation, ou filait du lin, quand le temps était mauvais. Mona allait avec les jeunes filles de son âge, à la grève, chercher des brinic (coquilles de patèle), des moules, des palourdes, des bigorno et autres coquillages, qui étaient la nourriture ordinaire de la famille. Il faut croire que les Morgans, qui étaient alors très nombreux dans l’ile, l’avaient remarquée et furent, eux aussi, frappés de sa beauté.

Un jour qu’elle était, comme d’habitude, à la grève, avec ses compagnes, elles parlaient de leurs amoureux ; chacune vantait l’adresse du sien à prendre le poisson et à gouverner et diriger sa barque, parmi les nombreux écueils dont l’île est entourée.

— Tu as tort, Mona, dit Marc’harit ar Fur à la fille de Fanch Kerbili, de rebuter, comme tu le fais, Ervoan Kerdudal ; c’est un beau gars, il ne boit pas, ne se querelle jamais avec ses camarades, et nul mieux que lui ne sait diriger sa barque dans les passes difficiles de la Vieille-Jument et de la pointe du Stiff.

— Moi, répondit Mona avec dédain, — car à force de s’entendre dire qu’elle était jolie, elle était devenue vaniteuse et fière, — je ne prendrai jamais un pêcheur pour mari. Je suis aussi jolie qu’une Morganès, et je ne me marierai qu’avec