Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/116

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La fille de l’homme, comme il arrive souvent, en pareil cas, était haïe et détestée de sa marâtre. Ils habitaient un beau manoir, à Guernaour, aux environs de Coathuël. Au carrefour de Croaz-ann-neud[1], qui est sur la route qui mène de Guernaour au bourg de Plouaret, on voyait, dit-on, assez fréquemment, en ce temps-là, les Danseurs de nuit, et quiconque venait à passer par là, pendant qu’ils menaient leurs rondes, au clair de la lune, et ne voulait pas danser avec eux, était victime de quelque mauvais tour de leur part.

La dame de Guernaour le savait bien, et, un dimanche soir, après souper, elle dit à Lévénès :

— Allez me chercher mon livre d’heures, que j’ai oublié à l’église, dans mon banc.

— Oui, mère, répondit la jeune fille.

Et elle partit, seule, bien que la nuit fût déjà venue.

Il faisait un beau clair de lune. Quand elle arriva au carrefour de Croaz-ann-neud, elle vit une foule de petits hommes, qui dansaient en rond, en se tenant par la main. Elle eut peur, la pauvre enfant, et voulut d’abord retourner sur ses pas. Mais, elle songea que si elle revenait, sans le livre, sa marâtre la gronderait et la battrait peut-être,

  1. La Croix-au-fil.