Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/185

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étonné de les voir si intelligents, et il se demandait si c’étaient bien là des moutons véritables.

Lévénès devint enceinte. Elle avait une suivante, dont le jardinier du château était l’amant, et qui se trouvait aussi enceinte, sans que sa maîtresse en sût rien. C’était la fille de la vieille qui avait changé ses frères en moutons, et elle l’ignorait également. Un jour, que Lévénès se penchait sur le rebord d’un puits, qui était dans le jardin, pour en voir la profondeur, sa suivante la prit par les pieds et la précipita dans le puits. Après quoi, elle courut à la chambre de sa maîtresse, se coucha dans son lit, ferma les rideaux des fenêtres et ceux du lit, et feignit d’être malade, en peine d’enfant. Le seigneur était absent, pour le moment. Mais, à son retour, ne trouvant pas sa femme dans le jardin, au milieu de ses moutons, comme d’habitude, il se rendit à sa chambre.

— Qu’avez-vous, mon petit cœur ? lui de-manda-t-il, croyant la trouver couchée,

— Je suis bien malade, répondit la traîtresse. Et, comme il voulait entr’ouvrir les rideaux :

— Je vous en prie, n’ouvrez pas les rideaux, je ne puis supporter la lumière.

— Pourquoi restez-vous seule ainsi ? Où est votre suivante ?

— Je ne sais ; je ne l’ai pas vue, de toute la journée.