Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/442

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— Je vous l’ai dit, cent écus, et pas un liard de moins.

— Vous voulez dire cent sous ?

— Non, cent écus, vous dis-je.

— Il faut que vous ayez perdu la tête, pour parler de la sorte.

— Le petit Moine, mon compagnon, n’avait qu’une peau, et il l’a vendue cent écus ; j’ai vu l’argent, et je veux aussi en avoir autant de chacune des miennes.

Les tanneurs, l’entendant déraisonner de la sorte, lui jetèrent ses peaux à la tête et s’en allèrent, de telle façon que le Moine s’en retourna à Bégard, sans en avoir vendu une seule. Il n’était pas content. Le petit Moine, le voyant revenir avec la charrette pleine de peaux, lui demanda ;

— Vous n’avez donc pas vendu vos peaux ?

— Vous vous êtes moqué de moi, répondit-il, furieux ; vous m’avez ruiné, mais, vous me le payerez !…

— Comment, les peaux ont donc baissé ? demanda l’autre, ironiquement ; combien vous a-t-on offert de chacune ?

— Vous me le payerez, je le répète, répondit le grand Moine, et il montrait le poing à l’autre.

— Nous serons toujours bien approvisionnés en viande, pour longtemps, répondit tranquillement le petit Moine.