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iii
préface

que j’ai sacrifié le succès de librairie, le côté commercial, à la fidélité et à l’exactitude rigoureuse qu’exigent des ouvrages de ce genre, destinés autant, si non plus, à servir à l’histoire et à la philologie qu’à la littérature et à l’esthétique. L’important, en pareille matière, est de faire vrai, et non de faire beau.

J’ai eu bien de la peine à faire comprendre, même à des esprits cultivés et lettrés, la différence qui doit exister entre un ouvrage historique et critique, tel que celui que j’ai voulu faire, et un ouvrage de littérature et d’esthétique, où l’imagination peut avoir sa large part, comme le Barzaz-Breiz de M. de La Villemarqué, par exemple. C’est en vain que je leur disais : — Mon but a été uniquement d’être un collecteur exact et consciencieux, en recueillant les chants du peuple breton, tels qu’on les trouve réellement dans nos campagnes, et avec tous leurs défauts et leurs imperfections de tout genre, communs d’ailleurs aux chants populaires de tous les peuples, comme lacunes, interpolations, anachronismes, banalités, grossièretés même, mœurs à demi-barbares ; le tout entremêlé souvent de grandes beautés de sentiment et même de forme, comme le fumier d’Ennius, avec ses paillettes d’or. J’ai voulu fournir à l’histoire, à la philologie et à la critique des documents dans lesquels elles pussent avoir une entière confiance, car, comme le dit avec beaucoup de raison un historien et un archéologue savant et consciencieux : — Rien n’est décourageant comme d’avoir à s’appuyer, en matière historique, sur des documents que l’on croit authentiques, et dont, plus tard, on reconnaît la brillante futilité. »[1].

  1. (1) M. Anatole de Barthélémy, — compte-rendu du premier volume des Gwerziou Breiz-Izel, — Revue archéologique, numéro de Décembre 1869, — page 456.