Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/192

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sa nourrice, puis les trois inconnus continuèrent leur route et se rendirent auprès de la mère, qui gardait le lit. Quand celle-ci vit son mari en colère et les yeux semblables à deux charbons ardents, au fond de leurs orbites, de frayeur, elle cacha sa tête sous les draps.

— Je t’avais bien recommandé, malheureuse femme, lui dit-il, de ne pas faire baptiser mon fils, et tu as voulu me désobéir. Mais, heureusement, je suis arrivé à temps, et le mal n’est pas encore fait. Écoute-moi bien, et prends garde d’agir contrairement à ce que je vais le dire, ou tu t’en repentiras : tu garderas notre fils près de toi, sans le baptiser, jusqu’à l’âge de dix ans. Quand il entrera dans sa sixième année, tu l’enverras à l’école, chez les moines de l’abbaye voisine, et le jour où s’accomplira sa dixième année, je viendrai moi-même le chercher pour l’emmener avec moi, ou j’enverrai quelqu’un des miens. M’obéiras-tu, cette fois ?

— Oui, répondit la pauvre femme, saisie de frayeur.

Et les trois cavaliers, qui étaient trois diables, partirent.

L’enfant venait bien et avait bonne mine. Le jour où il entra dans sa sixième année, sa mère l’envoya à l’école à l’abbaye, comme le lui avait recommandé le père. Il apprenait tout ce qu’il