Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/260

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adresse, et si vous ne me rapportez pas une réponse, dans un an et un jour, vous serez pendus tous les deux, votre maître et vous.

Voilà nos deux hommes bien embarrassés.

Aller en paradis, vivant, et en revenir de même, quand il est si difficile, dit-on, d’y aller après sa mort !... Et puis, quel chemin prendre ?...

Après avoir longtemps délibéré entre eux, sans rien trouver. Joll, prenant enfin une décision, dit : À la grâce de Dieu ! et partit.

Nous laisserons maintenant son maître et le roi, pour le suivre dans son voyage.

Il va, il va, toujours devant lui. Quand il demande le chemin du paradis, on le prend pour un pauvre innocent ; d’autres le prennent pour un plaisant et l’injurient ou lui jettent des pierres. Déjà ses habits sont en lambeaux, et il n’a plus de chaussures, ni d’argent pour en acheter. Que faire ?

— Ma foi ! dit-il, je vais me bander les yeux ; peut-être arriverai-je plus facilement ainsi.

Et il se banda les yeux et se remit à marcher. Ceux qui le rencontraient s’étonnaient de le voir dans cet état par les chemins ; les enfants le suivaient en criant et en lui jetant des pierres. Il n’y faisait pas attention et allait toujours, sans se plaindre ni parler à personne.

Il y avait six mois qu’il marchait ainsi, nuit et jour, sans éprouver ni faim, ni soif, ni aucun