Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/317

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honteux, tout tremblant et se faisant aussi petit qu’il pouvait.

— Ah ! Satan, me reconnais-tu ? lui dit Innocent. Comme te voilà honteux et tremblant ! Tu as donc peur de moi ? Tu as raison, car tu as pris ma place. Allons ! déguerpis, et vite !

Et aussitôt il partit par la cheminée, sous la forme d’un éclair.

— Eh bien ! mon père, dit Innocent, en se tournant vers le roi, ne vous l’avais-je pas dit ?

— Votre père, dites-vous ? Ah ! je voudrais bien l’être ; ne vous moquez pas d’un malheureux, car je suis bien malheureux !

— Oui, vous êtes mon père ; et vous, dit-il en se retournant vers la reine, vous êtes ma mère !

Et il se jeta dans leurs bras et les couvrit de baisers. Puis il leur conta tout, et la substitution opérée dans le berceau, et son séjour chez un archevêque allemand, et les grâces toutes spéciales qu’il avait reçues de Dieu.

Le roi et la reine pleuraient de joie et de bonheur. Ils firent publier par tout le royaume que leur fils était retrouvé, et, pendant quinze jours, il y eut au palais des festins publics, où le pauvre était aussi bien reçu et aussi bien traité que le riche, ce qui ne se voit pas tous les jours.

Cependant, Innocent, qui n’aimait pas les fêtes, les cérémonies, l’étiquette et toutes les intrigues