Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/350

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— Il n’y a pas de mal à cela ; mais allons ! viens vite, je n’ai pas de temps à perdre.

— Oui, oui, certainement, puisque mon tour est venu, dites-vous. Cependant, je ne voudrais pas partir comme cela, avant d’avoir ferré les chevaux que vous voyez là, à ma porte. Asseyez-vous là un peu, sur ce fauteuil ; ce sera l’affaire d’un instant, puis je vous suivrai où vous voudrez.

— Je suis pressée, et je n’ai pas le temps d’attendre ; je vais te donner le coup de grâce.

Et elle leva sa faux pour le frapper.

— Mais patientez donc un peu, vous dis-je ; qu’est-ce que cela vous fait ? vous saurez bien rattraper le temps perdu. Laissez-moi du moins finir de ferrer la haquenée de mon recteur (curé). Trois fers sont déjà posés ; il n’en manque plus qu’un, et, pour l’honneur de mon nom, je ne voudrais, pour rien au monde, laisser dans cet état le dernier cheval que j’aurai ferré, surtout celui de mon recteur ! Que dirait le bienheureux saint Éloi, quand je me présenterai devant lui, là-haut ? Asseyez-vous là, dans ce fauteuil, vous dis-je ; ce sera fait en un clin d’œil !

La Mort s’assit dans le fauteuil. Sans-Souci fut alors rassuré, et il se remit au travail, en sifflant et en chantant. Il mettait le fer au feu, soufflait, puis le battait sur l’enclume, et ne se pressait point. Il finit de ferrer le cheval de son recteur,