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Il fallait passer une petite rivière pour aller à la lande, et, comme il n’y avait pas de pont dessus, Jannig était obligé de charger ses moutons sur ses épaules et de leur faire ainsi passer la rivière, l’un après l’autre, car les moutons sont comme les chats, ils n’aiment pas l’eau.

Quand vint le printemps, Jannig, qui n’était ni un sot ni un paresseux, songea à construire lui-même un pont sur la rivière, pour faire passer ses moutons et n’être plus obligé d’entrer dans l’eau glacée, pendant l’hiver. Il se mit donc au travail avec courage, avançant un peu chaque jour, si bien que, pour la fête de la sainte Vierge, à la mi-août, le pont était entièrement terminé.

En ce temps-là, Notre Sauveur Jésus-Christ voyageait en Basse-Bretagne, avec une partie de ses apôtres. Un jour qu’il était seul avec saint Pierre, son grand ami, ils arrivèrent au pont de Jannig, vers midi.

— Tiens ! s’écria saint Pierre, on a construit un pont sur la rivière, depuis la dernière fois que nous avons passé par ici. Qui donc a fait cela ? N’importe, nous en profiterons pour passer l’eau, à pied sec, plus heureux que l’autre fois.

Et ils passèrent sur le pont. Quand ils furent de l’autre côté de l’eau, ils aperçurent Jannig assis au bord de la rivière, laissant pendre ses pieds au fil de l’eau claire et écorchant une baguette