Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/157

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


QUATRIÈME VEILLÉE


Banquo. — Les créatures dont nous parlons étaient elles réellement ici, tout à l’heure, ou avons-nous mangé de la racine qui trouble la raison et la retient captive ?
(Macbeth).


I

L’hiver sera très-dur, cette année, et bien triste !
Il faut s’y résigner, et que Dieu nous assiste.
Le vent souffle du nord. Il vient de Roc’h-al-laz,
Par-dessus Saint-Michel : mauvais présage, hélas !
Oui, l’hiver sera dur : l’aspect de la nature
N’a rien de rassurant. Quel sinistre murmure !…
Quels affreux hurlements pousse au loin l’Océan,
Qui rugit sous les coups pressés de l’ouragan !
Les hommes sont méchants. Par des leçons sévères
Dieu veut les avertir. Respectons ses colères.
Un navire a sombré, dit-on, à Locquirec ;
Un autre s’est perdu, près de Perros-Guirec.
Oui, l’hiver sera triste ! Mais, narguons les tempêtes
Et le froid et le vent qui tonne sur nos têtes.
Laissons tomber la neige, et contre ses rochers
L’Océan s’emporter et, sur les hauts clochers
Et les toits du manoir, grincer les girouettes,
Et, dans le fond des bois, piauler les chouettes ;
Nous sommes à l’abri des grands vents et des flots :
Pourtant, ayons pitié des pauvres matelots.