Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/193

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générale, dans les temps anciens, — car cela se voit dans presque tous les vieux contes, — il fallait bien qu’il y eût quelque fond de vérité. Pour moi, je remarque avec peine que l’homme devient de plus en plus dur et ingrat, envers les animaux, même les plus inoffensifs. Il les poursuit, les pourchasse, les traque partout et les force ainsi à le fuir, à le détester et à chercher un asile loin de lui. Autrefois, au contraire, — et dans mon enfance, cela se voyait encore, — les chers animaux de Dieu ne craignaient pas le voisinage de l’homme, et vivaient en bonne intelligence et en excellents rapports avec lui. Les lièvres gîtaient sans crainte dans les courtils mêmes qui touchaient aux habitations, et dans chaque champ, quand on sarclait les blés, on découvrait des nids de perdrix de douze ou quinze œufs, que l’on respectait religieusement. Les pies, les merles, les grives, les pinsons, les fauvettes, les moineaux et maints autres petits oiseaux de toute sorte, nichaient tranquillement et sans être jamais inquiétés, dans les haies et les buissons qui entouraient les fermes et dans les arbres dont les rameaux s’étendaient souvent jusque sur les toits des maisons. L’hiver, les rouges-gorges et les roitelets pénétraient dans les habitations mêmes, où on leur distribuait des miettes de pain ; on jetait encore quelques poignées de grains sur la neige et la glace, pour les oiseaux un peu moins familiers. Aussi, aux premiers rayons du soleil printanier, quels concerts