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Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/90

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rolles, les bassins de cuivre jaune, frottait les meubles, les armoires, les buffets, les vieux bahuts de chêne sculpté, de sorte que c’était plaisir de voir la cuisine de la vieille Marc’harit, qui y précéda Barbaïc. Tout était d’une admirable propreté, tout brillait et reluisait, et l’on pouvait se mirer partout. Il faisait beau être cuisinière à Kerarborn ! Aussi, quand Marc’harit allait se coucher, elle avait soin qu’il y eût toujours une bonne braise au foyer, l’hiver ; elle plaçait au coin de l’âtre un galet arrondi et poli par les flots de la mer, et qui avait assez la forme d’une citrouille, et de son lit, elle voyait son lutin chéri qui venait s’y asseoir et se chauffer, jusqu’au chant du coq, quand sa besogne était faite, en écoutant les chansons de son ami le grillon. Il avait tout au plus un pied de haut et jamais Marc’harit n’avait pu voir son visage, qui disparaissait sous un chapeau à larges bords, comme on en porte dans une partie de la Cornouaille. On était habitué au bon lutin, et on ne s’en effrayait point, car il n’avait jamais fait de mal à personne.

Un jour, la vieille Marc’harit mourut, et la jeune Barbaïc recueillit sa succession si enviée, comme cuisinière du manoir. Elle en était toute heureuse et toute fière. Tout alla on ne peut mieux, dans les premiers temps. Le lutin était bien aise et bien heureux d’épargner la peine et le plus grossier du travail à la belle et rieuse Barbaïc, et il se réjouissait de