Aller au contenu

Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/89

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fiers et superbes animaux ne furent plus que de misérables rosses.

Et puis Barbaïc Loho, vous savez bien ce qui lui arriva, à Kerarborn ?

— Oui, dit Katel, la pauvre Barbaïc ! Elle est maintenant bien vieille, bien cassée, bien misérable. La dernière fois que j’allai à Plouaret, je la vis qui ramassait quelques branches de bois mort que le vent avait fait tomber des arbres, dans le bois de Kerarborn. J’eus bien de la peine à la reconnaître ; sa vue me causa une grande tristesse, et je me dis presqu’involontairement :


— Pauvre femme ! — ton corps fléchit sous la douleur, Passe donc, et t’en va dans un monde meilleur ! —


— Mais il faut nous dire un mot de l’histoire de Barbaïc, à nous autres qui ne la connaissons pas, dit le vieux Fanch Ar Floc’h. Car moi aussi j’ai eu affaire aux lutins, et je sais qu’ils n’aiment pas à être contrariés.

— Eh ! bien, reprit Katel, Barbaïc Loho était servante à Kerarborn, en Plouaret. Elle était jeune, alors, rieuse et espiègle. Kerarborn avait aussi son lutin familier, qui avait soin des vaches ; — aussi, donnaient-elles toujours, en abondance, un lait délicieux, riche en crême et en beurre. Le lutin de Kerarborn ne s’occupait pas des chevaux, et ne voulait Être agréable qu’aux femmes. La nuit, il balayait la cuisine, lavait les marmites, écurait et fourbissait les casse-