Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/92

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bouillie étaient toujours trop douces ou trop salées, les crêpes brûlées, les viandes pas assez cuites ; les domestiques se plaignaient constamment de leur nourriture, si bien qu’on congédia Barbaïc. Elle trouva facilement à se placer ailleurs ; mais le malheur la suivit partout, et bientôt personne ne voulut plus d’elle. Alors, la pauvre fille se laissa aller au désespoir, n’eut plus de courage à rien et bientôt on la vit réduite à mendier de porte en porte, vieille à trente ans, et courbée sous la malédiction du lutin qu’elle avait offensé.

— Oui, oui, dit Ar Floc’h koz, il ne faut jamais plaisanter avec les esprits, ni chercher à leur faire de mal surtout, car ils se vengent toujours, et notre force et toutes nos malices, ils s’en moquent bien. Qui était plus fort et plus malin que Malo Kerlouarn ? et cependant…

— Mais, Fanch koz, laissez donc Pipi finir son histoire, qui est restée en route…

— C’est toujours ainsi, dit Pipi ; quand on vous prie de parler, vous n’avez rien à dire ; puis, dès que quelqu’un veut conter quelque chose, vous l’interrompez à tout moment et fourrez deux, trois histoires dans la sienne, de sorte que, quand il veut reprendre, il ne sait plus où il en était.

— Vous en étiez Pipi, dit Gorvel, au moment où la peur vous prit, après avoir injurié et défié le lutin de Rune-Riou.

— Oui : eh ! bien, ces histoires de vengeance de lutins que je me rappelais, et d’autres