Page:Lyndamine ou l’Optimisme des pays chauds, 1875.djvu/24

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et à cette époque j’appris à défendre l’optimisme des pays chauds.

Nos premières conversations et nos premiers plaisirs furent sur le ton du pensionnat. Toutes les jeunes demoiselles se voyaient, se parlaient, jouaient ensemble, tandis que le caractère faisait son choix. Insensiblement, Émilie jouait et parlait plus volontiers avec moi ; je parlais et je jouais plus volontiers avec Émilie ; ainsi le cœur se déclare ; cette marche est encore dans la nature. Sans presque nous en apercevoir, nous parvînmes si solidement à nous connaître et à nous aimer que nous eûmes le secret de nous faire loger seules et dans une chambre à deux lits. Il en coûta d’abord quelques petites intrigues ; le lecteur s’en doute bien ; mais de quels projets ne vient-on pas à bout lorsque l’on est deux et d’accord et qu’il ne s’agit que d’être protégée par une fille dont l’âme tendre se rend à des caresses qu’on lui prodigue et à des soumissions qui préviennent ses ordres ? Émilie et moi nous tâchions de concert, par nos complaisances, de mériter cette préférence de la mère-maîtresse, et elle l’accorda. Il s’en fallait de beaucoup qu’elle devinât l’usage que nous devions faire de notre solitude, et l’espèce de plaisir que la nature et le besoin nous préparaient.

Dès le premier soir qu’Émilie put en liberté s’expliquer avec moi :

— Chère Lyndamine, me dit-elle, si tu n’es pas telle que je l’augure, je suis bien trompée ; nous sommes tête à tête ; parle. Ce n’est pas seulement l’âge, c’est