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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/21

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RIENZI.

lonna, mais il partit à contre-cœur et tout en larmes. « Acceptez-moi pour frère, dit le généreux jeune homme, pressant tendrement sur son cœur la main de l’étudiant, il me faut un frère comme vous. »

Rienzi ne répondit rien ; il ne le voyait, il ne l’entendait pas ; de sombres et sévères pensées, des pensées qui renfermaient le germe d’une puissante révolution, occupaient son cœur. Il s’en éveilla en sursaut, comme les soldats arrangeaient leurs boucliers de manière à former une sorte de brancard pour le cadavre ; alors, fondant en larmes, il les écarta avec vivacité, pour presser sur son cœur la dépouille insensible jusqu’à ce qu’il fût littéralement trempé du sang qui filtrait au travers.

La guirlande du pauvre enfant n’était pas échappée de son bras, même dans sa chute, et, engagée dans ses vêtements, elle s’enroulait encore autour de lui. Ce spectacle rappelait à Cola toute la douceur, le bon cœur et les grâces séduisantes de son frère unique, de son unique ami ; spectacle qui semblait rendre encore plus cruel le sort prématuré et immérité de cet innocent garçon ! « Mon frère ! mon frère ! gémissait le survivant, comment reverrai-je notre mère ? comment reverrai-je même la nuit et la solitude ? Si jeune, si innocent ! Voyez, messires, il n’était que trop gracieux. Et l’on ne veut pas nous faire justice, parce que son meurtrier est un noble et un Colonna ! Et cet or donc, de l’or pour le sang d’un frère ! Ne nous feront-ils pas… » et les yeux du jeune homme étincelaient comme des flammes, « ne nous feront-ils pas justice ? Le temps le fera voir ! » À ces mots, il inclina sa tête sur le cadavre ; ses lèvres murmurèrent comme une prière ou une invocation, puis il se releva : sa figure était aussi pâle que celle du mort placé près de lui, mais ce n’était plus de douleur qu’elle était pâle.

De cette argile sanglante, de cette prière intérieure,

RIENZI. — I