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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/24

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RIENZI.

ancêtres étrangers pour une terre conquise et un peuple dégénéré. Tandis que le reste de l’Italie, surtout à Florence, Venise, Milan, dépassait de beaucoup et promptement le reste de l’Europe par les arts et la civilisation, les Romains semblaient plutôt reculer qu’avancer ; ils ne jouissaient des bienfaits ni des lois ni des arts, et ne connaissaient ni l’élan chevaleresque d’un peuple guerrier ni les avantages d’une nation pacifique, mais ils avaient toujours le sentiment et le désir de la liberté, et par de farouches transports, par des luttes désespérées, s’efforçaient de maintenir à leur cité ce titre qu’elle s’arrogeait toujours de métropole du monde. Les deux siècles qui venaient de passer les avaient vus agités par des révolutions, courtes, souvent sanglantes, et toujours malheureuses. Il n’y en avait pas moins la vide et pompeuse apparence d’une forme de gouvernement populaire. Chacun des treize quartiers de la cité nommait un maire, et l’assemblée de ces magistrats appelés Caporioni possédait en théorie une autorité qu’ils n’avaient ni le pouvoir ni le courage d’exercer. Il n’y en avait pas moins l’orgueilleux titre de sénateur : mais les fonctions, présentement, n’en étaient accordées qu’à une ou deux personnes choisies tantôt par le pape, tantôt par les nobles. L’autorité attachée à ce titre semble n’avoir jamais été bien définie ; c’était celle d’un dictateur inflexible ou d’une indolente marionnette, selon que son possesseur pouvait assurer plus ou moins de vigueur à la dignité dont il était revêtu. Elle ne fut jamais accordée qu’à des nobles, et c’était par les nobles qu’étaient commis tous les outrages. Toutes les fois qu’on invoqua la justice publique, c’était pour satisfaire des haines particulières et l’ordre invoqué n’était jamais qu’un prétexte pour l’exécution de la vengeance.

Tenant leurs palais comme les princes leurs châteaux