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RIENZI.

et leurs forteresses, en se prétendant chacun personnellement indépendant de toute autorité, de toute loi, bâtissant des remparts, et réclamant des principautés sur les territoires qui formaient le patrimoine de l’Église, les barons romains rendaient leur puissance encore plus assurée et encore plus odieuse en entretenant des troupes de mercenaires étrangers, surtout allemands, à la fois plus braves de caractère, plus disciplinés au service, et plus habiles au métier des armes que même les plus libres Italiens de ce temps. Ainsi ils unissaient l’autorité du magistrat à la force militaire non pour la protection mais pour la ruine de Rome.

Les plus puissants de ces barons étaient les Orsini et les Colonna ; leurs inimitiés étaient héréditaires et incessantes, et chaque jour voyait les fruits de leurs guerres effrénées, le carnage, le pillage et l’incendie. La flatterie ou l’amitié de Pétrarque, qui a trouvé trop de crédulité chez les historiens modernes, a revêtu les Colonna, surtout ceux de l’époque où nous entrons, d’une enveloppe de distinction et de dignité qui ne leur appartient pas. Violences, fraudes, assassinats ; une avarice sordide qui leur faisait envahir toute place à bénéfice, une insolente oppression de leurs concitoyens, les adulations les plus lâches à l’égard d’un pouvoir supérieur au leur ; voilà, à peu d’exceptions près, les traits caractéristiques des membres de la première famille de Rome. Mais, plus riches que les autres barons, ils étaient par conséquent plus voluptueux et peut-être plus sensibles aux plaisirs de l’esprit ; ils étaient flattés dans leur orgueil, en se voyant protecteurs de ces arts dont jamais ils n’auraient pu devenir les professeurs. De ces tyrannies multipliées, les citoyens romains s’en revenaient, avec un tendre et impatient regret, à leurs idées ignorantes et confuses d’une grandeur et d’une liberté déchues. Ils confondaient les jours de l’empire