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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/27

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RIENZI.

mand ; et une plus haute paye, plus de licence dans le pillage, rendaient les tentes des compagnies bien plus séduisantes que la solde régulière d’une cité, ou le triste château fort et les coffres appauvris d’un chef. Werner, le plus implacable, le plus féroce de tous ces aventuriers et qui s’était ouvertement fait gloire de ses horribles cruautés, au point de porter sur sa poitrine une plaque d’argent, avec ces mots gravés dessus : « Ennemi de Dieu, de pitié et de miséricorde, » Werner avait, peu de temps auparavant, ravagé la Romagne par le fer et le feu. Mais, soit à prix d’argent, soit parce qu’il ne pouvait contenir les farouches démons qu’il avait enrôlés, il ramena dans la suite le gros de sa compagnie en Allemagne. De petits détachements, cependant, demeurèrent dispersés d’un bout à l’autre du pays, n’attendant qu’un chef capable de les réunir encore une fois ; parmi ceux qui paraissaient les plus propres à jouer ce rôle était Walter de Montréal, chevalier de Saint-Jean, gentilhomme provençal. Sa valeur et son talent militaire avaient déjà, même dans sa jeunesse, élevé son nom à une terrible célébrité ; et son ambition, son expérience, sa sagacité, relevées par certaines qualités nobles et chevaleresques, étaient appropriées à des entreprises bien plus grandes et plus importantes que les violents brigandages du barbare Werner. Aucun État n’avait plus cruellement souffert de ces fléaux que Rome. Les territoires qui sont proprement dits les États du pape, en partie arrachés à son autorité, par de petits tyranneaux, en partie dévastés par ces voleurs étrangers, ne fournissaient qu’un maigre revenu aux besoins de Clément VI, le gentilhomme le plus accompli et le plus charmant voluptueux de son temps, et le bon père avait imaginé un plan qui devait enrichir à la fois et les Romains et leur pontife.

Près de cinquante ans avant l’époque où nous entrons en scène, Boniface VIII avait institué la solennité du