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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/49

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RIENZI.

signora, courons, nous allons tomber dans leurs mains !

Mais le conseil de Benedetta venait trop tard, les robes flottantes des deux femmes les avaient déjà trahies : En un moment elles furent bloquées par ces maraudeurs. Une rude main arracha le voile de Benedetta ; et à la vue de ces traits que le temps n’avait pas ménagés, le brutal assaillant rejeta la pauvre nourrice contre la muraille avec un juron, auquel répondit un rire bruyant de ses camarades.

« Tu as joliment de la chance, Giuseppe !

— Oui, pas plus tard que l’autre jour il tombait encore sur une fillette de soixante ans !

— Et alors, par manière de perfectionner sa beauté, il lui a balafré la figure d’un coup de poignard, pour lui apprendre à n’en avoir pas plutôt seize !

— Paix, camarades ! qu’est-ce que nous avons là ? dit le chef de la bande, cavalier richement vêtu, qui frisait l’âge mûr, mais qui n’en avait que plus l’habitude des excès de la jeunesse ; et à ces mots il arracha la tremblante Irène des mains de ses satellites. — Ho ! Ici les torches ! Oh ! che bella faccia ! Quelle rougeur ! Quels yeux ! Allons, ne regarde pas à terre, ma belle ; tu n’as pas à rougir de gagner l’amour d’un Orsini… Oui-da : sache bien quelle est ta glorieuse conquête… C’est Martino di Porto qui te demande un sourire !…

— Au nom de la Vierge bénie, lâchez-moi !… Non, Seigneur, je n’en ferai rien, je ne suis pas sans amis, cette insulte ne passera pas !…

— Écoutez le timbre argentin de cette petite voix grondeuse : j’aime mieux ça que les tayaux de mes meilleurs limiers en chasse ! Cette aventure vaut un mois passé en sentinelle. Eh bien ! vous ne voulez pas venir !… on se rebelle, on crie même !… Francesco,