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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 2, 1865.djvu/234

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RIENZI.

nouillaient ensemble, tendant des mains suppliantes, priant Dieu d’envoyer ses bénédictions sur la tête du libérateur qui leur était rendu. En effet, le sénateur tribun s’avançait, comme « le Phénix vole à son bûcher. »

Revêtu d’une robe écarlate, toute ruisselante d’or, exposant sa tête superbe aux rayons du soleil, penché sur ses arçons, Rienzi traversa lentement la foule. On ne pouvait, dans le transport de son émotion, voir sur son visage glorieux les traces des maladies et des soucis ; l’embonpoint même qu’il avait pris donnait à son extérieur un air plus majestueux. Dans ses yeux brillait l’espérance ; sur son front rayonnaient le triomphe et l’empire. Les spectateurs ne pouvaient se contenir, ils se pressaient, se poussaient en avant, les uns sur les autres, aspirant à saisir un coup d’œil du grand homme, à toucher le bord de sa robe. Lui-même il était profondément touché de leur joie. Il s’arrêta, d’une voix tremblante, il s’efforça de leur adresser quelques paroles brisées… « Je suis bien payé, dit-il, bien payé de tout le passé ; puissé-je vivre pour vous rendre heureux ! »

La multitude se sépara pour lui faire place, puis elle se referma derrière lui. Leur imagination exaltée croyait voir derrière le tribun marcher aussi la déesse protectrice de la Rome d’autrefois.

Sur un noble cheval caparaçonné de drap d’or, tout couvert d’une robe blanche comme la neige, parsemée de diamants dont l’éclat éclipsait le soleil, venait la belle et royale Nina. En ce moment où l’on avait oublié son orgueil et son faste, elle n’était guère moins bienvenue, moins idolâtrée que son époux. Avec son sourire tout rayonnant de joie, avec ses lèvres frémissantes d’émotion et d’orgueil, jamais elle n’avait paru à la fois plus digne d’amour et de respect ; c’était une Zénobie passant à travers les splendeurs de Rome, non pas en captive, mais en reine.