Page:Méchin-Desquins - Traduction libre de la cinquième satire de L. Arioste, 1846.djvu/9

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Dans le choix d’une épouse, ami, crains le hasard.
D’abord, d’un œil prudent, étudie avec art
De toute la maison les goûts et le mérite ;
De la mère, des sœurs, observe la conduite.
Eh ! si tu vas choisir à grands frais tes troupeaux
Dans la plus noble race, aux plus lointains hameaux,
Le choix de ta moitié sera-t-il moins sévère ?
Ainsi qu’on ne vit pas de la biche légère
Naître l’énorme buffle ou le pesant taureau,
Ni dans l’aire de l’aigle éclore un tourtereau,
On ne vit pas non plus, d’une mère coquette,
Descendre une beauté d’une vertu parfaite ;
Du tronc qui l’a nourri le rameau se ressent.
Hélas ! l’instinct du mal, qu’on apporte en naissant,
Par l’exemple éveillé, se prononce et s’augmente.
Qu’une jeune rusée, encore adolescente,
Près de sa mère ait vu la troupe des galants
Prodiguer à l’envi les soupirs et l’encens ;
Jalouse à cet aspect, bientôt cette orgueilleuse
Aspire au vain honneur d’une cour plus nombreuse ;
Aisément sur sa mère elle croit l’emporter
Lorsque de plus d’attraits elle peut se vanter.


Vainement d’un sang pur ton épouse est sortie,
Si d’indignes leçons son âme fut nourrie.
Peux-tu donc ménager tes soins observateurs ?
Vois si les yeux d’un père ont veillé sur ses mœurs
Et si déjà la cour où son rang l’a livrée
D’un encens corrupteur ne l’a point enivrée ;
Si les arts de Minerve occupent ses loisirs,
Ou si tout son printemps se perd en vains plaisirs ;
Près d’elle observe tout, compagnes et suivante,
Je veux de la vertu dans tous ceux qu’elle hante.