Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/133

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

EUE DE SAINT-GILLES 12^)

Tôt droit en mi sa voie a Caïfas trovc,

Un grant coup li dona, moût l'a bien asené, ....

Enfresci el menton li fist le hranc coler (v. 2347-2551).

D'après le texte norniin, il est déjà arrivé au palais : il entre dans la salle avec son épée nue et, y trouvant Caïfas, il le frappe ; mais au lieu de lui fendre la tête, il lui abat seulement le bras. Dans le français, après cet exploit, Macabre excite tous ses hommes à courir sus à Elie ; Élie se défend hors des murs de la ville, et trouve moyen de pénétrer dans le « verger » de Rosa- monde, où se dresse une forte tour, dont elle lève le pont dès qu'Elie y est entré. Dans la saga, le bon Macabre, loin d'en vou- loir cà Élie de la correction violente qu'il a administrée à Caïfas, lui garantit toute sécurité. Cependant Elie se résout à s'enfermer avec Rosamonde dans une tour et à chercher un messager qui aille en France prévenir son père et Guillaume d'Orange, qui viendront conquérir le pays. C'est là que s'arrête la version norvégienne. Il faut avouer que ce n'est pas très clair, et on peut conjecturer que le manuscrit suivi par Robert était non seulement incomplet de la fin, mais endommagé dans le der- nier feuillet qui s'en était conservé. Mais le manuscrit français que nous avons repose-t-il aussi sur un original mutilé ? On est vraiment tenté de le croire, car le dénouement, — à part la substitution d'Avisse à Rosamonde, qui tient en quelques vers et aurait pu être pratiquée dans le texte original par un léger changement, — n'est certainement pas le dénouement primitif, et M. Raynaud l'a reconnu. Il le conclut de la mention de Marchegai, le cheval d'Élie dans Aioiil, bizarrement substitué (v. 2566) au cheval Prinsaut « l'Aragon », dont la conquête est si longuement racontée dans la partie antérieure, et de la réapparition de Corsant de Tabarie, tué dans le combat par lequel s'ouvre le poème. Toutefois, ce peut être là une dis- traction, et le nom de Marchegai peut avoir été introduit par le dernier remanieur ; mais d'autres raisons nous engagent à regarder la dernière laisse, qui ne compte pas moins de 418 vers, comme l'œuvre d'un continuateur récent. La longueur même de cette laisse, tout à fait inusitée (les autres laisses comptent en moyenne 67 vers), est un indice, surtout si on considère qu'elle est sur la plus facile et la plus banale des asso-

G. Paris. — Moyen dge, 9

�� �