Aller au contenu

Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/205

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LA LEGENDE DE PEPIN « LE BREF » 201

à Pépin, c'est d'avoir tué de sa main le roi Justamont, le père du célèbre Guitequin. Dans l'ancienne chanson des Saisîtes dont la cinquième branche de la Karlaniagnus Saga nous a conservé une traduction, cet exploit est rappelé d'une façon assez drama- tique dans un dialogue entre Guiteclin (Guitaliii) et Charle- magne, séparés par le fleuve sur lequel Charles construit un pont. Guiteclin lui demande de quel droit il envahit son pays ; l'empereur répond que la Saxe est son patrimoine, car Pépin son père la possédait. Guiteclin. réplique, avec force invectives, que Charles n'est pas même roi légitime de France, car il n'est que le bâtard de Pépin \ qui l'engendra un jour en revenant de la chasse : quand il naquit, on l'exposa devant les portes de Saint-Denis, et il y fut recueilli et élevé par charité. Charle- magne réplique qu'il est le fils de Pépin et de sa femme épousée ; son père Pépin a tué, pour de justes causes, le père de Guiteclin et l'a emmené lui-même en France, où il a renié ses idoles et accepté le baptême ; il a reçu alors la Saxe en fief ; mais aussi- tôt il est retourné au service du diable. Guiteclin se répand en menaces et jure de venger la mort de son père-. — Ce père, tué par Pépin, n'est pas nommé ici ; mais le renouvellement des

��Ogiiilo, qui a avec lui Saxoiws et Alaiiiannos, se trouve séparé des ennemis par le Lech : « Provocati tandem Franci inrisionibus, gentis illius, indigna- tione commoti, periculo se dederunt, etc. » (Pertz, SS., I, 328); la même scène se reproduit plus tard entre Pépin et les Saxons des deux côtés de rOcker(/i., 330). Ces insultes et ces provocations entre Saisnes et Francs d'une rive d'un fleuve à l'autre sont tvpiques pour les guerres de Saxe, et on les retrouve dans les chansons consacrées à Charlemagne comme dans celles qui célébraient Clotaire.

1 . Je suis ici la leçon de la famille B (qui a passé à la version danoise). Le ms. A donne « Ornolf » au lieu de Pépin, et on est tenté de voir là un sou- venir d'Arnulf, le père d'Anseïs et le chef réel de la lignée carolingienne. Mais la réponse de Charles semble plutôt s'appliquer à l'accusation que formule la rédaction B, et on a là sans doute le reste d'une ancienne version des Enfances de Charles Martel, plus tard transportées à Charlemagne : on sait que Charles Martel était réellement bâtard de Pépin « le Moyen ».

2. Karlaniagnus Saga, éd. Unger (Christiania, 1860), V, 25-26. Cf. Bibl. lie TEc. des Chartes, 6<^ série, t. I, p. 28 ; Pedcrsens Danske Skrifter, éd Brandt (Copenhague, 1856), p. 77.

�� �