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LA LITTERATURE NORMANDE AVANT L ANNEXION 73

Le berceau de la littérature française a été l'héroïque Normandie. C'est là que l'esprit chevaleresque du moyen âge français, du moyen âge en général, est arrivé à son premier épanouissement ; c'est là que pour la première fois se montre la belle fée de la poésie romantique (die holde Fee Roniantik), qui comble de ses dons l'enfant encore sommeillant dans son berceau. Les fils du Nord, amis des légendes héroïques, furent les pères nourriciers de l'en- fant ; ils le bercèrent sur leurs boucliers arrondis ou sur leurs barques agiles, et pour compagnes de jeux ils lui donnèrent les vagues de la mer ' .

Et aussitôt le savant professeur de Halle nous parle de l'accueil que firent les Normands, une fois devenus maîtres de l'Angleterre, aux traditions anglo-saxonnes. Ils n'accueillirent pas moins volontiers, je le dirai tout à l'heure, les traditions celtiques; mais cela prouve surtout leur esprit d'adaptation et ne se produit qu'à une période où les Normands étaient déjà complètement romanisés. Il continue : « Ce qui nous est arrivé, jusqu'à l'année 1060, de littérature française est pour la plus grande part composé en dialecte normand. » Je ne sais, j'en conviens, ce qu'entend au juste par là mon savant ami [^]. Il ne peut vouloir parler des documents qui par leur écriture sont antérieurs à 1060, car de ces documents, qui sont, comme on le sait, au nombre de cinq ^\ aucun n'a été ni composé ni écrit dans la région normande, et les trois premiers sont anté- rieurs à l'établissement des Normands en France. Il entend donc, sans doute, outre la Vie de saint Alexis, écrite, en effet, selon toute apparence, en Normandie vers 1040, la composi-

��1. Bihliotheca Normannica. Denhnàler iwrDtannischcr Literahir itnd Sprachc herausgegeben von Hermanu Suchier. L Reinipre'digt (Halle, Niemever, 1879), p. vn.

2. [G. Paris, signalant dans la Romaiiia, XXVIII (1899), p. 642, le tirage à part de cette lecture, ajoutait : « Si je la signale ici, c'est surtout pour y cor- riger une méprise dont m'avait avisé M. Suchier. Je lui attribue l'assertion que « ce qui nous est arrivé, jusqu'à l'année 1060, de littérature française est pour la plus grande partie composé en dialecte normand ». M. Suchier avait écrit : «jusqu'à l'année 1160 », et dès lors les réflexions que cette phrase pouvaient provoquer n'étaient pas celles que j'ai formulées à la suite de mon erreur de chiffres. »]

3. Les Serments de Strasbourg (842), la séquence de Sainte Eulatie, le frag- ment d'homélie sur Jonas (fragment de Valenciennes), la Fie de saint Léger et la Pasuon (poèmes de Clermont) .

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