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Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/90

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86 LITTÉRATURE FRANÇAISE AU MOYEN AGE

la mort de Notre-Dame. Mais c'est pour de plus hauts patrons qu'il composa ses deux grandes œuvres historiques, la Geste des Brelans, dédiée en 1155 à la reine Aliénor, et la Geste des Noi- iiKiiids, commencée en 1 160 sur l'ordre d'Henri I"', interrompue, après un travail de quinze ans, quand le vieux poète apprit que le roi avait confié la même tâche (de nîettre en vers français l'histoire des ducs de Normandie) à un rival plus jeune et plus en faveur, le Tourangeau Benoit de Sainte-More. Cette inter- ruption est très regrettable, car l'œuvre de Wace serait devenue infiniment précieuse quand il serai^ arrivé aux événements dont il pouvait avoir une connaissance personnelle. Telle qu'elle est, s'arrètant à la bataille de Tinchebrai, elle forme encore un monument des plus intéressants, non seulement pour le philologue, mais pour l'historien, car Wace flùt à ses sources latines des additions, souvent fort curieuses, qu'il puise dans la tradition orale. Puis il a en lui-même, ce brave clerc de Caen, cet ancêtre de nos hoinaies de lettres, qui nous assure si ingé- nuement qu'il « prend » volontiers, et que tout travail lui est doux quand il croit y « guaaignier », quelque chose de vraiment sympathique. Par son amour sincère de la vérité (lui demander de la critique serait peu raisonnable), par la justesse habituelle de son jugement, par son style sobre, net, sans grand éclat, mais toujours assez vif et souvent animé d'une ironie presque épigrammatique, il nous représente bien l'esprit normand d'autrefois tVans sa teneur moyenne, et il mérite d'être de la part des Normands l'objet d'études attentives. Il est malheureux que la seule édition critique et commentée de la Gesle des Nor- iiiands ait été donnée en Allemagne ' ; très digne d'éloges, elle n'est pas tellement définitive qu'elle interdise d'en entreprendre une autre, et je voudrais bien la voir se préparer au sein de l'université de Caen, ainsi qu'une nouvelle édition de la Gesle

��I. Maistre ÎVaces Roiinin de Roii et des ducs de Xoninindie, uach deii Haiid- scbriflen von Nenetn herauso'eiJ^elh')! von D"" Hugo Aiidrcsen, 2 \?oll. (Heilbronn, 1877 et 1879). Il faut joindre à cette édition, outre les comptes-rendus dont elle a été l'objet, les recherches publiées depuis par M. Andresen sur les sources de la Clironique de Benoit de Sainte- More comparées à celles de Wace (Roniaiiisclie Forschungen, t. Il, p. 477-538).

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