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LA LITTÉRATURE NORMANDE AVANT l' ANNEXION 8)

traditions gréco-orientales, renouvela et amplifia le poème de Lambert le Tort sur le roi macédonien, dont il portait le nom ', et qu'un Normand inconnu paraît avoir composé une chanson de geste d'après ce qu'on appelle la Vindicfa Salvatoris, l'histoire fabuleuse de la prise de Jérusalem par Titus et de l'extermination des juifs ^. Plus véritablement historique est la traduction en laisses monorimes du livre de Baudri de Bourgueil sur la première Croisade ' ; ici nous entrons véritablement dans l'histoire, qui devait fournir aux poètes normands du xii'^ siècle la matière de leurs œuvres les plus dignes d'attirer l'attention de la postérité.

Celui dont cette postérité a jusqu'ici le mieux retenu le nom + est maître Wace, né à Jersey vers iioo, longtemps « clerc lisant » h. Caen, et enfin chanoine de Bayeux >. J'aime- rais, si j'en avais le temps, à retracer devant vous cette curieuse et attachante figure, qui nous présente pour la première fois le vrai type de l'écrivain de profession. Wace vivait de sa plume, et aussi de celle de ses copistes ; car il faisait, quand il avait assez d'argent pour cela, exécuter de ses œuvres des exemplaires qu'il tâchait de vendre un bon prix. Mais il les composait d'abord sur commande, et le premier patron était naturellement celui qui payait le mieux. Il a ainsi écrit pour Robert, fils de Tiout, « qui aimait beaucoup saint Nicolas », une vie de ce saint, et sans doute pour d'autres, bien que nos manuscrits omettent leurs noms, des vies de saint Georges et de sainte Marguerite, et ses poèmes sur la Conception et sur

��1. Voy. P. Me}'er, Alexandre le Grand dans ht 1 il ferai are française dn nioven dge (Paris, 1886), t. II, p. 227.

2. Sur la probabilité d'une origine normande pour ce poème, voy. mon édition de r7;i'iT//crî7(' de Nicodhne (ci-dessous, p. 90, n. 2), p. xxiv.

3. Voy. ma Liltêrature française an moyen dge [4*: éd., Paris, Hachette, 1909], §86.

4. Mais elle a bien de la peine à le lui donner correctement. On n'arrive pas à débarrasser Wace du prétendu prénom de Robert, dont on l'a affublé par une absurde méprise sur le sens d'un de ses vers. Waee est ce que nous appe- lons aujourd'hui un prénom, et notre auteur n'a jamais pris de « surnom «.

5. Sur la vie et les ouvrages de Wace, vov. Romania, t. IX, p. 592-614 [c.-r. par G. P. de l'édit. Andresen].

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