Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/242

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bien des années comme celles-là se suivaient, souvent ; que les uns ne pouvaient pas toujours aider les autres et qu’il fallait autre chose que la charité pour que chacun ait du pain.

Quant aux riches, ma foi, je les respectais peu. Alors, le communisme me vint à l’idée.

Le rude travail de la terre m’apparaissait tel qu’il est, courbant l’homme comme le bœuf sur les sillons, gardant l’abattoir pour la bête quand elle est usée ; le sac du mendiant pour l’homme, quand il ne peut plus travailler : le fusil de toile comme on dit dans la Haute-Marne.

On n’amasse pas de rentes en travaillant la terre, on en amasse à ceux qui en ont déjà trop.

Les fleurs des champs, la belle herbe fraîche, vous croyez que les petits qui gardent les bestiaux jouent avec cela ! Ils ne demandent le gazon que pour s’étendre et dormir un peu à midi ; je les ai vus.

L’ombre des bois, les moissons blondes que le vent agite comme des vagues, est-ce que le paysan n’est pas trop fatigué pour trouver tout cela beau ? La besogne est lourde, la journée est longue ; mais il se résigne, se résigne toujours ; Est-ce que la volonté n’est pas brisée ? L’homme est surmené comme une bête.

Alors le sentiment de l’injustice qui lui est