Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/289

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Après cette digression nécessaire, je reprends mon récit et j’arrive au voyage de Calédonie dont j’ai parlé à peine.

Je n’avais jamais voyagé que de Chaumont à Paris ; la mer fut pour moi le plus beau des spectacles, quoique les gravures, les récits et surtout mon imagination m’eussent blasée dès l’enfance sur l’Océan.

On le voit bien en songe tel qu’il est, cet Océan, mais quand la réalité arrive, cette fois-là, on reste charmé, magnétisé par l’immensité.

Comme il y avait longtemps que j’aimais la mer ! Je l’avais toujours aimée.

Pour premiers jouets, mon grand-père me faisait des bateaux, de beaux navires dont on pouvait carguer les voiles avec des câbles de gros fil.

J’ai des fragments d’un premier récit de ma vie, où je le racontais :


Pour mes premiers jouets il me fit des bateaux,
De beaux bateaux pontés ayant haubans et hunes
Et dans la pierre ronde on les mettait à flots,
À travers les crapauds monstres aux teintes brunes
Qui sur les ponts parfois faisaient d’énormes bonds.
C’était près du vieil orme et des ruches d’abeilles.
Des roses de Provins aux pétales vermeilles
Étendaient leurs rameaux sur les résédas blonds
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