Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/309

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une certaine somme de connaissances et en fera bénéficier les siens.

Le beau sauvage est vêtu en étrange Européen, il sait lire, et il venait écrire chez moi ; nous parlions de Daoumi, du long passé d’ombre des tribus, du court avenir qui se prépare pour les hommes ignorants et désarmés avec nos avidités et nos innombrables moyens de destruction. Devant cette intelligence haute et ferme, devant ce cœur brave et bon, je me demandais : Quel est l’être supérieur, de celui qui s’assimile à travers mille difficultés des connaissances étrangères à sa race, ou de celui qui, bien armé, anéantit ceux qui ne le sont pas ?

Combien, si c’est une preuve de supériorité que les autres races s’effacent devant la race blanche, des légions de tigres, d’éléphants, de lions, nous sembleraient supérieurs si, couvrant tout à coup l’Europe, ils mettaient la patte sur nous ! Les monstres primitifs, à ce triomphe de la destruction, seraient terriblement nos maîtres !

Les cerveaux ne sont pas cultivés, il y a de bonnes terres en friches et de vieilles cultures bien épuisées, c’est ainsi pour les races humaines.

Entre ceux qui ne savent rien, et ceux qui savent mal — faussés depuis des milliers de générations, par toutes les infaillibilités qui se trompent — la