Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/429

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iront où l’homme qu’on appelle leur souteneur, — parce qu’il les bat et les exploite — les enverra.

Elles iront seules aussi : est-ce qu’on ne va pas toujours, toujours de devant soi quand on est perdue ?

Il y a aussi des ouvrières voleuses, elles ont gardé des bouts d’étoffe. Est-ce que messieurs les grands couturiers envoient reporter les restes ?

D’autres avaient fabriqué des allumettes. Dame ! les enfants avaient faim.

D’autres ont trompé leurs maris ! Est-ce qu’ils ne les ont jamais trompées ?

Si on laissait les gens se choisir eux-mêmes au lieu d’appareiller les fortunes, cela n’arriverait pas si souvent.

D’autres encore (des vieilles le plus souvent), quand elles crèvent de faim et qu’elles ont envie de vivre encore un peu, insultent un agent pour avoir du pain en prison.

Lorsque j’étais prévenue, j’ai vu une de ces vieilles qui n’avait rien mangé depuis si longtemps que, après avoir pris un peu de bouillon, elle s’affaissa comme ivre.

Quelques jours après elle mourait, son estomac ne pouvant plus s’accoutumer à aucune nourriture.

À Clermont, en cellule, je ne voyais personne,