Aller au contenu

Page:Mémoires de l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse - 1901 - tome 1.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
65
toulouse en 1764

de Valentinois, prince héréditaire de Monaco, dont il paraît avoir courtisé la femme, non sans succès, autant qu’on puisse en juger par ses confidences à mots couverts.

On comprend qu’avec un tel caractère Picqué n’ait guère compté d’amis véritables. Il le constate lui-même (p. 166) : « Dans le cours de ma vie, j’ai rencontré peu d’amis, mais beaucoup de simples connaissances. Comme je m’éloignais beaucoup du monde, beaucoup de monde s’éloigna de moi et me laissa à ce qu’il appelait mon originalité. Je ne m’en plaignais point… Ad libitium. » Il ne cite guère qu’un ami du nom de Doléac, qui, « après avoir beaucoup voyagé, était revenu passionné de Paris » et lui fit quitter sa « vie nomade ». Il devint son « inséparable », changea toutes ses habitudes, « infortune d’où je date tous les malheurs de ma vie ». Mais, ajoute-t-il, « en m’accordant un ami, le ciel m’a ôté le droit de m’en plaindre. Puis-je jamais oublier mes premiers plaisirs, les songes toujours aux ordres de l’amour ? Tendres illusions, ne m’abandonnez pas !… »

Esprit médiocre et pédant, jaloux et vindicatif, libertin et libre-penseur à la façon des Encyclopédistes dont il se vantait d’être le disciple, homme « sensible » à la mode de Jean-Jacques Rousseau et féru comme lui de la Nature, Picqué a écrit des mémoires qui n’ont pas de valeur littéraire. Trop souvent, en outre, ils manquent de netteté dans les idées et de précision dans les faits. Ils seraient même peu intéressants à lire s’ils ne fournissaient certains détails typiques sur un temps déjà bien effacé dans nos souvenirs. Nous en détachons ce qu’il dit de Toulouse lorsqu’il y vint faire ses études médicales à l’âge de seize ans. Mais il ne faut pas oublier qu’en 1824-1825 il avait déjà soixante-seize ans et qu’il écrivait sous l’influence de bien des idées qui n’étaient pas celles de sa jeunesse. De plus, après avoir fait recopier son manuscrit par une main étrangère, il l’a si souvent lu et relu dans la suite, annoté et corrigé, qu’il lui a souvent enlevé sa première saveur. Quoi qu’il en soit, voici comment il nous raconte son départ de Lourdes, son voyage, son arrivée et son séjour à Toulouse :