Page:Mémoires de l'Institut national de France (tome 34, partie 2 - 1895).djvu/146

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le 15 novembre 1316, la reine accoucha, non pas d’une fille, mais d’un fils qui mourut au bout de peu de jours ou peut-être passa pour mort. Un moment Philippe parut hésitant. Mais, dans le courant de décembre 1316, il prit le titre de roi de France et, peu après, le titre de roi de France et de Navarre. À ce moment, Agnès, duchesse de Bourgogne, fille de saint Louis et aïeule de Jeanne, fille de Louis  X, le duc de Bourgogne lui-même, fils d’Agnès, cet Eudes qui semblait conquis à la fortune de Philippe de Poitiers, et d’autres amis puissants essayèrent d’arrêter l’ambition de celui que les grands avaient accepté pour régent, mais qu’ils n’entendaient pas tous faire roi. Quelques-uns déclarèrent que le royaume de France revenait de droit à la fille de Louis X. Les partisans de Philippe répondaient, bien entendu, qu’en France les femmes ne succèdent pas à la couronne. Mais c’est un point qui ne saurait être prouvé à l’évidence, remarque à ce propos un esprit difficile (Jean de Saint-Victor)[1].

Agnès protesta solennellement, réclamant, après débat régulier, une décision des pairs du royaume (décembre 1316). Eudes adressa, de son côté, au comte de Flandre un mémoire circonstancié très favorable à sa nièce, mais manquant, somme toute, de fermeté[2]. Quant à Philippe, il ne s’arrêta pas à dis-

  1. « Post cujus mortem (la mort de Jean Ier) comes Pictavensis regnum obtinuit. Sed dux Burgundiæ contradixit. Dicebat enim quod neptis sua, tanquam regis filia et fratre suo defuncto propinquior, debebat succedere ipso jure. Cui in oppositum dicebatur quod in regno Franciæ mulieres succedere non debebant. Hoc tamen probari non poterat evidenter. Et ideo dux et mater ejus ducissa ad diversos barones litteras transmittebant, rogantes quod coronationi dicti comitis minime consentirent. » (Jean de Saint-Victor, dans D. Bouquet, t. XXI, p. 665.)
  2. Ces documents ont été publiés par M. Servois dans l’Annuaire-Bulletin de la Société de l’histoire de France, 1864, 2e partie, p. 65-68, 71. Eudes, le 10 janvier 1317, déclare, il est vrai, garder les convenances faites avec le roi ; mais, en réalité, par le même acte, il tend à se dégager.