Page:Mémoires de l’Académie de Stanislas, 1864.djvu/63

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ne vient même pas maintenir dans les limites du probable[1].

Dans le sommeil magnétique, l’intelligence, tout en se mouvant dans un cercle d’idées assez restreint et choisi par une initiative étrangère, y déploie toutefois une activité et une puissance merveilleuses qu’on a cherché à exprimer par le mot Lucidité, mot qui serait vrai si on ne lui avait pas accordé une signification impossible dans ce monde. Une fois lancée dans un courant, elle le suit en le dominant de toute la grandeur d’une âme dégagée des liens qui l’attachaient à la matière. Chaque

  1. Il m’a été cité à cet égard un fait qui prouve que lorsque la raison a conservé ses droits, le magnétisé sent lui-même l’impossibilité de faire un tableau exact de ce qui n’est pas encore arrivé à sa connaissance d’une manière quelconque. Une personne appartenant à une des classes élevées de la société put, après avoir été endormie, citer dans leur ordre et sans se tromper toutes les enseignes d’une des rues de Paris. Invitée ensuite par son magnétiseur à décrire l’intérieur d’un des magasins nommés, elle dit : Je ne puis, car je n’y suis jamais entré. Pendant son séjour dans la capitale, elle était passée plusieurs fois dans cette rue dont les inscriptions avaient frappé ses yeux. Son cerveau avait reçu d’une manière passive ces impressions qui, tout à coup, se sont réveillées en elle avec toute l’énergie de la réalité et avec une fausse apparence de nouveauté. Mais un pareil phénomène psychique ne peut avoir lieu que lorsque le moi est détaché de tous les liens qui le tiennent plus ou moins enchaîné à ce qui l’entoure, et qu’il peut s’abandonner tout entier à l’idée qu’il poursuit ou qu’on lui fait poursuivre. Aussi à son réveil, ce somnambule fut-il incapable de reproduire la série d’indications qu’il avait données.