Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/160

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la roche calcaire, ils y paraissent, non pas comme une chose formée sur place, mais avec le caractère d’un horsd’oeuvre apporté d’ailleurs. J’ai visité les carrières qui enceignent la ville de Caen, carrières nommées Allemagne, Vaucelles et Maladrerie : j’ai écouté les ouvriers carriers parlant de leurs mines d’exploitation avec eux j’ai remarqué des coups de sabre ; c’est le nom qu’ils donnent à des veines creuses, lancéolées, qui vicient la pierre en quelques places. J’ai également avec eux remarqué de longs tuyaux siliceux qu’ils appelent broquettes, sous-entendant par là le pénis humain, dont ils ont changé le nom par décence : aussi les ouvriers appellent-ils leur banc en exploitation le banc à broquettes. La géologie connaît ces tiges siliceuses et sait en expliquer la formation.

Ceci témoigne seulement de la situation insolite de ces pierres d’origine granitique au sein d’une roche calcaire. Ces pierres de quartz et de feld-spath sont donc choses transportées là d’ailleurs. Mais qui aurait opéré ce transport ? un animal sans doute, et nécessairement un animal qui aura vécu dans la contrée et à l’époque reculée, où les hauts bancs calcaires du pourtour de Caen se sont formés. Or on trouve précisément enfouies à cette même place, les dépouilles d’un animal, auquel ces données conviennent. Cependant nous laisserons-nous amener à la supposition que cet animal, notre téléosaure, tenait, surpris par la mort, de ces pierres renfermées en lui-même ? Mais il faudra encore admettre qu’il s’en sera emparé au loin, vers des plages granitiques. J’épuise cette série de conjectures, en présumant que les téléosaures avalaient des pierres, comme beaucoup d’animaux d’aujourd’hui, qui en garnissent leur estomac.